Une année atypique et contrastée en rendement, que les acteurs de la filière sauront néanmoins gérer

dijon-cereales-La récolte de céréales à paille est engagée dans presque toutes les régions françaises. Par manque d’éléments disponibles à ce jour, il est encore trop tôt pour la qualifier avec précision. Les résultats s’annoncent contrastés, même entre parcelles au sein d’une même exploitation. Les rendements nationaux pourraient être inférieurs à la moyenne des cinq dernières années.

Un potentiel très élevé jusqu‘à la fin mai…

Les conditions exceptionnellement douces de l’hiver et l’absence à la fois de sécheresse et de fortes températures (à l’exception de l’extrême Sud-Est) conduisaient à un état végétatif très satisfaisant des céréales à paille (avec une forte densité d’épis) laissant présager une belle collecte, même si trois facteurs tempéraient partiellement ce pronostic :
– une incidence forte de viroses liée à la présence de pucerons vecteurs du virus de la jaunisse nanisante sur blés et sur orges,
– un fort salissement des parcelles, avec en particulier beaucoup de graminées, favorisées par la douceur des températures,
– un risque de verse important, surtout pour les orges, lié à la densité de la végétation.

… qui a évolué négativement jusqu’à fin juin…

Le climat de fin mai à fin juin se traduit par des excès d’eau tout à fait exceptionnels, et un très faible rayonnement reçu par les cultures (déficit d’énergie à un moment où les besoins sont très élevés). Trois conséquences :
– un système racinaire ennoyé et donc des problèmes de nutrition des plantes, aggravé par la verse,
– un déficit de rayonnement induisant un risque de diminution du nombre de grains/épis et des petits grains,
– une poussée des maladies sur feuilles et sur épis.

… pour aboutir à une probabilité de rendement de moyen à médiocre et très contrastée…

D’une « très bonne année » possible, on va sans doute aboutir à un rendement moyen national inférieur à la moyenne des cinq dernières années, avec de fortes variations entre régions et entre parcelles au sein de chaque région. Certaines exploitations en zones particulièrement affectées par les intempéries connaîtront des difficultés financières qui parfois s’ajoutent à de mauvaises récoltes (en particulier celle de 2014).

… mais une collecte qui permettra globalement d’alimenter les divers débouchés…

A noter néanmoins que la France, par rapport aux grands bassins de production mondiaux, se caractérise par une remarquable stabilité du volume de sa collecte. Malgré une récolte probablement plus faible que la moyenne quinquennale, au plan national, la quantité collectée, complétée par le stock de report, permet chaque année, et encore en 2016, d’alimenter le marché.

Par ailleurs, les organismes stockeurs disposent de l’expertise et des équipements nécessaires pour alloter, trier, nettoyer… les grains afin de gérer l’hétérogénéité annoncée de la récolte 2016, comme ils le font chaque année.

… et des agriculteurs qui doivent dès à présent anticiper la campagne à venir…

Le salissement des parcelles et la probable abondance de petits grains qui retomberont au sol lors de la moisson impliquent pour les agriculteurs d’adapter leurs techniques pour gérer l’enherbement sur le long terme.

Par exemple, réaliser des « faux semis » pour faire lever le maximum de graines avant toute implantation de culture ou de couvert végétal sera souvent nécessaire. De même, autant que faire se peut, et dans les parcelles les plus « sales », il sera préférable de rompre le cycle des adventices par l’introduction en 2017 d’une culture de printemps.

Jean-Paul BORDES (ARVALIS – Institut du végétal)

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