Orge d’hiver : des symptômes visibles suite aux températures froides de fin avril

Des symptômes sur épi sont actuellement visibles sur orge en raison du froid survenu fin avril dans la région. Le point sur la situation.

Rappel sur les seuils d’alerte

Il n’existe pas de seuils fiables concernant la sensibilité des céréales à des accidents climatiques.

Les repères historiques retenus chez ARVALIS – Institut du végétal doivent être considérés comme des seuils d’alerte, et non systématiquement des seuils de dégâts. Les conditions d’apparition du froid ou du gel au champ sont très variables et les références reposent souvent sur des températures « station météo », sous abri, à 1,5 m du sol, et donc forcément différentes de celles effectivement ressenties par les cultures.

Selon le stade auquel le froid apparaît, deux seuils existent :
• Concernant le gel d’épi, le seuil habituellement retenu est de – 4°C, peu après le stade épi 1 cm. Cependant, la hauteur de l’épi dans la tige et son état de développement font fluctuer sa résistance au cours de la montaison.

• L’altération de la méiose mâle est également mal renseignée. Les facteurs de stress sont multiples : températures basses (< 2°C) et hautes (> 30°C), rayonnements faibles, sécheresse, carence (induite) en bore et/ou cuivre, avec un effet prépondérant des faibles rayonnements sur les températures. Pour rappel, la méiose correspond à peu près au moment où le sommet de l’épi atteint la ligule de l’avant-dernière feuille, sur une parcelle, ce stade dure environ 2-3 jours.

Dans notre région, les températures minimales enregistrées sur la dernière décade d’avril s’approchent des – 4°C sur la partie Est de la région : le Pays d’Ouche, le Merlerault et le département de l’Eure.
Carte 1 : Températures minimales atteintes (°C) du 15 avril 2017 au 7 mai 2017

source ARVALIS – Institut du végétal et Météo-France

En zoomant sur le secteur de l’Oudon dans le Calvados, des températures proches des – 4°C sont enregistrées. A cette période, les orges étaient entre les stades dernière feuille et méiose.
Figure 1 : Offre climatique entre le 15 avril et le 7 mai 2017 – station l’Oudon – variété d’orge Etincel

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Source ARVALIS – Institut du végétal et Météo-France

Les températures minimales ont été enregistrées entre le 20/04/2017 et le 26/04/2017. Les plus basses températures enregistrées sont de l’ordre de – 4°C sur la toute la région Normandie.

Quelles conséquences ?

Les températures gélives arrivées entre le stade dernière feuille et méiose provoquent des dégâts qui sont davantage susceptibles de se limiter à une partie de l’épi ; ils vont entraîner la destruction des pièces florales internes en cours de différenciation, sans faire totalement disparaître les glumes et glumelles déjà initiées. Ce sont actuellement les symptômes visibles que nous rencontrons dans certains secteurs de la région en particulier dans l’Eure.

Photos 1 à 3 : symptômes de gel sur une partie des épis.
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Source ARVALIS – Institut du végétal.

Quel en sera l’impact sur le rendement et la qualité du grain ?

Deux cas peuvent se présenter :
• Si l’accident est tardif et dans un sol à faible réserve hydrique, il est possible que de jeunes talles émergent, mais leur impact sur le rendement sera quasi nul. En revanche, la qualité de la récolte risque d’être gênée par la présence de « verdillons », tardillons récoltés encore verts. En orge brassicole, cela affectera le calibrage ; en blé, la présence de ces grains immatures peut engendrer des dégradations du temps de chute de Hagberg.

• Si l’accident est précoce et/ou dans un sol à bonne réserve hydrique, il va y avoir compensation (au moins partielle) via les talles déjà présentes qui n’ont pas régressé, et pas forcément de montée de nouvelles talles. La perte de rendement sera partiellement compensée, la population de grains sera probablement plus hétérogène avec des effets possibles sur le poids spécifique. Pour de l’orge brassicole, la question du calibrage demeure ainsi que celle de la capacité de germination. Le caractère brassicole risque de tomber.

En cas de gel d’épis significatif, faut-il songer à retourner la parcelle ?

Le retournement d’une culture pose plusieurs questions : d’abord de possibilité de réimplantation (freins liés aux herbicides déjà appliqués), puis de rentabilité économique (qui dépend des potentialités de l’éventuelle culture de remplacement en fonction du sol, du climat de la région et de la date de semis). Le seuil de retournement est donc à calculer dans chaque situation pédoclimatique et chaque contexte économique, il n’y a pas de valeur universelle. Pour conduire le raisonnement, il faut commencer par évaluer correctement le nombre d’épis restants et faire une estimation du rendement réalisable.

Penser que 200 épis/m2 x 45 grains/épi x 45 g (PMG) correspond à un rendement de 40 q/ha.

Helene LAGRANGE, Benjamin POINTEREAU (ARVALIS – Institut du végétal), Cynthia TORRECILLAS(ARVALIS – Institut du végétal)

 

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