Fertilisation des Céréales : Comment réajuster les valeurs de reliquat azoté de sortie d’hiver ?

Les épisodes de pluies parfois intenses de janvier ont pu générer un drainage important dans les sols déjà rechargés en eau. Une réactualisation des valeurs de reliquat s’impose pour les mesures réalisées durant les premières décades de janvier.

Le stock d’azote minéral à la date d’ouverture du bilan (ou reliquat azoté sortie d’hiver) permet de calculer la dose d’azote à épandre. Il est généralement établi de mi-janvier à courant mars, selon la région et la culture, par une mesure dans la parcelle sur toute la profondeur d’enracinement.

Etant donné les fortes pluies qui touchent certaines régions depuis quelques temps, il est nécessaire d’évaluer l’impact du drainage sur l’évolution du reliquat azoté en sortie d’hiver mesuré fin janvier/début février.

Ces précipitations importantes ont pu engendrer la lixiviation de l’azote nitrique du sol au-delà de la profondeur maximale d’enracinement de la culture, réduisant le stock d’azote minéral disponible pour cette dernière. Ce phénomène dépend du type de sol et de la lame drainante (quantité d’eau qui passe sous la profondeur exploitée par les racines).

Estimer la lame drainante

En première approximation, la lame drainante peut correspondre au cumul des pluies sur une période donnée si le sol est à la capacité au champ au départ, et si les conditions d’évapotranspiration sont peu intenses (souvent le cas en période hivernale avec de faible ETP).

Dans le cas contraire, il est possible de l’estimer en se basant sur un bilan hydrique au moment du prélèvement.

Des abaques pour estimer les pertes

L’azote du sol disponible pour les cultures peut être estimé finement par modélisation. A défaut de pouvoir utiliser un modèle, des abaques sont mises à disposition par le Comifer.

La valeur de reliquat valorisable (Ri) à retenir pour le calcul de la dose X sera ajustée en fonction de la lame d’eau drainée depuis la date de prélèvement de terre, du type de sol et de sa profondeur.

Pour le calcul, on peut prendre en compte la totalité de l’azote minéral du sol — l’azote nitrique (N-NO3) et l’azote ammoniacal (N-NH4) — car on considère que l’azote ammoniacal va très vite se transformer en azote nitrique.

UN EXEMPLE CONCRET !

1/ Je suis sur un limon profond (90-100 cm) et j’ai effectué des prélèvements sur trois horizons de sol le 14 janvier.

2/ L’analyse de terre indique 50 kg d’azote nitrique (N-NO3) dans l’horizon 0-30 cm, 20 kg dans l’horizon 30-60 et 30 kg dans l’horizon 60-90. Ceci fait un total de 100 kg N de reliquat.

3/ Entre le 15 janvier et le 15 février, il a plu 107 mm. Je considère que mes sols étaient à la capacité au champ au moment du prélèvement ; ce cumul de pluie correspond donc à la lame drainante.

A partir de ces informations, les abaques du Comifer permettent de mesurer le pourcentage de perte d’azote par lixiviation pour chaque horizon (figure 1).

Pour un sol de limon profond, une lame drainante de 100 mm provoque la perte définitive de 4,2 % de l’azote nitrique présent dans l’horizon 0-30 cm, 23,7 % de l’azote nitrique de l’horizon 30-60 et 82,2 % de l’azote nitrique de l’horizon 60-90. Dans notre cas d’étude, cela correspond à 2,1 kg N-NO3 perdus de l’horizon 0-30 (ils partent directement sous la profondeur de sol exploitable par les racines), 4,7 kg pour l’horizon 30-60 et 24,7 kg pour l’horizon 60-90.

Au final, au 15 février, on peut considérer que la fourniture en azote du sol est réduite de 31,5 kg/ha depuis la mesure du reliquat le 14 janvier. Le stock d’azote minéral du sol à prendre en compte pour le calcul de la dose totale est donc de 68,5 kg N-NO3.

Figure 1 : Pourcentage de l’azote par couche de sol perdu par lixiviation sous la profondeur de sol exploitable par les racines, selon la lame drainante (simulation à partir du modèle Lixim de l’INRA)


Téléchargez l’ensemble des abaques disponibles sur le site du Comifer :
– Notice d’utilisation des abaques d’ajustement du terme L
– Tables d’ajustement du terme L en fonction de la lame drainante


 

Christine LESOUDER (ARVALIS – Institut du végétal)