Symptômes inhabituels sur orge : le verdict tombe !

Depuis le début du mois d’avril, des symptômes très inhabituels apparaissent sur les feuilles de certaines variétés d’orge d’hiver. Après enquête et analyse, place au diagnostic.

Au sommaire :
• Les symptômes 2019
• Les hypothèses envisagées
• Le verdict

Les symptômes 2019

Les symptômes sont répartis régulièrement sur toute la parcelle. Ils se situent principalement sur F2, F3 et F4 selon les parcelles. Les taches apparaissent sur la face supérieure et transpercent rapidement la feuille. Elles sont donc visibles aussitôt sur la face inférieure.

Les symptômes apparaissent à la pointe de la feuille sous forme de petits points noirs qui engendrent des plages nécrotiques jaunes. Les points s’élargissent pour devenir des taches ovoïdes noires.


Symptômes au champ : nombreuses petites taches ocellées (brunissement central entouré d’un halo jaune), taches jaunes plus ou moins étalées, ponctuations noires.


C’est principalement les bouts de feuilles qui sont atteints.


Après avoir mis les feuilles atteintes en chambre humide (bouteille plastique vide mais perlée de gouttes d’eau), on n’observe pas de fructifications ou mycélium du champignon.

Les hypothèses envisagées

• Les grillures : elles ne sont pas dues à un champignon pathogène mais à un stress abiotique, notamment à un excès de rayonnement. Les symptômes apparaissent à partir de la montaison, le plus souvent au cours d’une période très ensoleillée faisant suite à une période de faible rayonnement. Les taches traversent difficilement la feuille si bien que la face inférieure des feuilles, à l’abri de la lumière, est beaucoup moins atteinte. Les feuilles à l’abri de la lumière sont peu ou pas touchées par ces symptômes.

• Les grillures polliniques : ce phénomène ne survient habituellement qu’après la floraison car il correspond à des grillures souvent exacerbées par le contact du pollen sur les feuilles. Toutefois, des pollens issus d’autres espèces que les céréales peuvent entraîner ce type de symptômes.

• La ramulariose : normalement, l’observation des symptômes est réalisée à partir du stade « épiaison ». Les symptômes de cette maladie s’apparentent à des mini-taches d’helminthosporiose. Ils se présentent sous la forme de taches brunes rectangulaires, courtes (jusqu’à 5 mm), entourées d’un halo jaunâtre. Elles suivent les nervures sur les deux faces. L’observation à la loupe de petits points blancs alignés émergeant des stomates (fine poussière blanche) sur les taches matures, au niveau de la face inférieure des feuilles, est un signe caractéristique, mais qui n’est pas toujours présent. Les périodes humides fin mai début juin coïncident avec des attaques sévères.

• Des marquages physiologiques : ces symptômes sont les plus délicats à identifier car ils peuvent prendre des formes variées et sont souvent confondus avec des maladies. La répartition des symptômes est le premier indicateur. Si seuls certains étages foliaires sont touchés, cela penche plutôt dans le sens d’une réaction à un stress abiotique.

Le verdict

Ce sont bien des marquages physiologiques qui sont la cause des symptômes observés cette année.

Autant ces marquages sont fréquents sur les cultures de blé tendre et blé dur, autant ils étaient jusqu’à maintenant peu fréquents sur orges.

Pour aboutir à ce diagnostic :
– L’analyse du climat durant les semaines précédant l’apparition des symptômes révèle des conditions favorisantes (fortes amplitudes thermiques depuis la fin février).
– Lors d’une nouvelle visite des parcelles 8 jours après, il n’y a pas d’aggravation constatée. Les symptômes ne se sont pas étendus ni dans la parcelle, ni aux nouvelles feuilles (éliminant de fait l’hypothèse de la ramulariose).
– L’observation à la loupe binoculaire n’a pas révélé la présence de pollen en train de germer sur les feuilles. Cela permet d’écarter l’hypothèse des grillures polliniques. De plus, dans le cas de grillures, la face supérieure à la courbure de la feuille est souvent plus attaquée en servant de réceptacle au pollen, ce qui n’est pas le cas dans les symptômes observés.

On observe sur le terrain un effet variétal. Ainsi les variétés signalées sont : KWS Cassia, Memento, Margaux, Newton, Amistar, Etincel, Rafaela, Tektoo, LG Casting…

Jean-Yves MAUFRAS (ARVALIS – Institut du végétal)