Gel de début mai : quelles sont les situations à risque ?

Sur la base des relevés de température et d’estimations des stades des blés et des orges d’hiver, nous tentons ici de préciser les lieux et conditions culturales à risque suite aux gelées du week-end dernier.

 Des températures négatives présentes à grande échelle, mais hétérogènes au sein d’une parcelle

Le pic de températures négatives a, le plus souvent, été atteint le matin du 6 mai. Il s’agissait fréquemment de gelées radiatives, conséquence du temps froid du week-end et de l’absence de nuages pendant la nuit. Ceci se traduit le plus souvent par une chute progressive des températures au cours de la nuit, avec un minima atteint à l’aube. Ainsi, les gels ne durent en général que quelques heures.

D’un point de vue spatial, les gelées sont présentes en de multiples endroits du territoire (carte 1). A cela, il faut rajouter que les conditions d’occurrence des gelées sont fortement dépendantes du microrelief, comme au printemps 2017. Il peut donc y avoir des dégâts localisés dans de nombreuses régions.

Carte 1 : Températures minimales atteintes (en °C) du 5 au 6 mai 2019

Des cultures aux stades étalés, mais souvent en phase de sensibilité marquée

Comme déjà évoqué, la montaison est une phase phénologique sensible des céréales vis-à-vis du gel. Cette sensibilité n’est pas constante au fil des stades, et les seuils de risques sont mal cernés car rarement caractérisés. Comparé à 2017, l’épisode de gel de cette année est en tendance moins fort, mais il intervient légèrement plus tard dans le calendrier et dans le cycle des cultures.

• Avant le stade Dernière Feuille Etalée (BBCH 39), une destruction partielle ou totale d’épis est à craindre en cas de gel. Pour cela, il faut des températures significativement inférieures à 0°C pour faire geler les cellules de l’épi. La pluie est un facteur aggravant : s’il a plu fortement juste avant l’arrivée de la gelée et que de l’eau libre est rentrée dans la gaine de la F1, elle peut cristalliser à proximité de l’épi et engendrer des dégâts.
⇨ Diagnostic : ouvrir la tige et observer l’épi
⇨ Pronostic : si l’épi du maître-brin est gelé, les talles peuvent prendre le relai (si les conditions hydriques et minérales sont favorables)

• Après le stade Dernière Feuille Etalée, la plante atteint le stade de la méiose pollinique. On sait qu’il s’agit d’une phase sensible de la culture, sans pouvoir cerner précisément le poids des stress thermiques, hydriques ou radiatifs.
⇨ Diagnostic : impossible avant la fin de la floraison : observation des fleurs et de l’autofécondation
⇨ Pronostic : si le pollen est faiblement affecté, des fécondations croisées entre plantes peuvent avoir lieu. S’il est fortement affecté, la fertilité épi sera significativement abaissée

• Autour de l’épiaison (cas d’orges précoces), les impacts sont difficiles à cerner, faute de références. Nous n’avons pas trace de destructions de fleurs ou d’épis lors de précédentes chutes de températures à des stades tardifs.

Carte 2 : estimation des dates d’atteinte du stade “dernière feuille étalée” pour le blé tendre – variétés et dates de semis régionalisées

Carte 3 : estimation des dates d’atteinte du stade “dernière feuille étalée” pour les orges d’hiver – variété Etincel et dates de semis régionalisées

Jean-Charles DESWARTE (ARVALIS – Institut du végétal)
Olivier DEUDON (ARVALIS – Institut du végétal)
Cécile GARCIA (ARVALIS – Institut du végétal)