Verse sur orges : comment raisonner les interventions ?

La maîtrise de la verse est un enjeu important au regard de son impact sur le rendement et la qualité des céréales, en particulier lorsqu’elle est importante et précoce. En revanche, des pertes de rendement peuvent aussi être constatées lorsque les régulateurs sont appliqués en mauvaises conditions. Alors, faut-il toujours réguler dans notre région ?

Les régulateurs n’apportent aucun gain spécifique en l’absence de verse (qualité, rendement), ils n’ont d’intérêt que si le risque de verse est réel.

Si le risque est avéré, un seul traitement est généralement suffisant s’il est réalisé en bonnes conditions. Et il ne faut pas oublier que la stratégie la plus adaptée peut être mise en défaut par des conditions de fin de cycle très difficiles (orages, vent violent …).

Estimer le risque verse à la parcelle

Le risque de verse est conditionné par plusieurs facteurs, dits facteurs de prédisposition. Le premier d’entre eux est génétique : les variétés d’orges ayant une note de verse ≥ 6 présentent un risque faible. En blé tendre, les variétés avec une note ≥ 6.5 ne présentent pas de risque de verse.

Une mauvaise gestion de la fumure azotée, sans fractionnement des apports et avec un premier apport excédentaire, favorise le maintien de nombreuses talles, ce qui augmente sensiblement le risque de verse.

De même, les trop fortes densités de semis entraînent un effet de compétition pour la lumière, provoquant un allongement des entre-nœuds, un étiolement des tiges et un risque de verse plus élevé : il faut donc bien raisonner ses pratiques culturales.

Les semis trop précoces allongent de manière significative le cycle végétatif : l’arrivée au stade épi 1 cm se fait alors précocement et la montaison se fait en jours dits « courts » avec un allongement des premiers entre-nœuds, ce qui provoque un affaiblissement de la tenue de tige.

Une grille intégrant ces facteurs permet d’estimer le risque à la parcelle (figure 1).

Tableau 1 : grille d’évaluation du risque de verse à la parcelle sur orge d’hiver (source ARVALIS – Institut du Végétal)

* Situations agronomiques avec reliquat de sortie d’hiver très élevé, apport d’azote précoce élevé ou apport régulier de matières organiques (forte minéralisation).

Figure 1 : Classement des variétés d’orge par rapport à la tolérance à la verse – synthèse pluriannuelle nationale (2008-2020)

Utiliser les régulateurs dans de bonnes conditions

Si le risque verse est élevé, l’utilisation d’un régulateur peut être programmée. Cependant, certaines conditions d’utilisation sont à respecter. Pour accroître l’efficacité et limiter la phytotoxicité, les applications sont à réaliser sur des cultures en bon état végétatif et dans des conditions climatiques favorables : temps poussant (pas de période de sécheresse), lumineux et sans forte amplitude thermique. Par ailleurs, il est nécessaire de tenir compte des conditions climatiques le jour de l’application mais aussi durant les 3 à 5 jours suivants. Si les conditions ne sont pas réunies, mieux vaut reporter l’application.

Tableau 2 : Conditions climatiques favorables pour l’application des régulateurs (source ARVALIS – Institut du Végétal)

Si ces conditions ne sont pas réunies, le régulateur peut être totalement inefficace et surtout on augmente fortement le risque de phytotoxicité et de perte de rendement (tableau 3). En cas de verse faible ou inexistante, une application de régulateur en mauvaises conditions climatiques provoque des pertes de rendement significatives.

Tableau 3 : impact sur le rendement des orges (en q/ha) permis par l’utilisation d’un régulateur selon la note de risque verse évaluée avec la grille ARVALIS

Où en sont les orges ?

Mi-avril, les orges sont en majorité au stade 1 nœuds et 2 nœuds dans notre région, créneau habituel d’intervention pour cette culture. Or les températures annoncées jusqu’au 20 avril restent froides (figure 2).

Tant que les conditions climatiques ne sont pas poussantes et que les cultures sont encore stressées, il est préférable de reporter l’opération si elle est nécessaire. De même, il est préférable d’éviter tout mélange qui pourrait être encore plus agressif sur une culture déjà fragilisée.

Figure 2 : Offre climatique depuis le 1er avril 2021 – Station météo de Saint-Quentin (80)

*températures et précipitations réelles jusqu’au 14/04, prévisionnelles ensuite

Pour en savoir plus, consultez nos préconisations régionales dans le guide « Choisir & Décider – interventions de printemps 2021 ».

Anne-Sophie COLART (ARVALIS – Institut du végétal)
Thierry DENIS (ARVALIS – Institut du végétal)
Elodie GAGLIARDI (ARVALIS – Institut du végétal)
Charlotte BOUTROY (ARVALIS – Institut du végétal)