Céréales : ne pas semer trop tôt et choisir une variété tolérante

4s1edz491_webSuite aux mauvais rendements et dans un contexte de prix bas, certains producteurs cherchent des pistes d’économie pour alléger les charges pour la campagne prochaine. Les premiers choix à faire : la variété et le couple date/densité de semis. Quels en sont les impacts ?

Choisir une variété tolérante

Le premier levier est le choix d’une variété avec un bon profil de tolérance aux maladies. Dans nos préconisations, nous préférons les variétés comme Fructidor, Fluor, Cellule qui présentent un profil sanitaire équilibré et une bonne productivité.


Figure 1 : Choix de la variété selon la situation
Extrait du guide régional Choisir et décider – Variétés et interventions d’automne

 

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Comme le montre la figure 2 (échelle de résistance globale aux maladies zone Nord), dans nos régions, entre les variétés les plus sensibles (Hyfi, Hywin, Trapez…) et les variétés qui le sont le moins (Fructidor, Granamax ou Cellule par exemple), en 2016, une économie de l’équivalent de 20 q/ha de protection fongicide était possible. Cette économie pourra être plus ou moins élevée en fonction du profil du printemps 2017.
Figure 2 : Echelle de résistance globale aux maladies zone Nord 2016 (T-NT)

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En outre, il est essentiel de diversifier ses choix variétaux car cela constitue la meilleure assurance pour minimiser l’impact d’un éventuel accident climatique (comme en 2016) ou d’une attaque parasitaire.

Pour faire des économies, ne pas semer avant le 15-20 octobre

Le deuxième point important sera la date d’implantation. Selon une synthèse d’essais de 1991 à 2016 où l’on observe le potentiel de rendement en % du rendement maximal de l’essai en fonction de la date de semis, il est possible de retarder les dates de semis (à condition parfois de pouvoir changer de variété) sans impacter fortement le potentiel de rendement. Si la plage optimale des semis semble se situer entre le 3-4 octobre et le 20 octobre, le fait de décaler la date de semis de 10 jours permet de réduire la pression parasitaire (adventices, ravageurs, maladies) sans entamer le potentiel. Dans le contexte de manque de pluviométrie de ces jours-ci, il peut être aussi judicieux d’attendre le retour de quelques pluies pour ne pas semer dans le sec.

A partir du 20-25 octobre, la majorité des types de blé d’hiver peuvent être semés. Les périodes de semis pourront se prolonger si nécessaire jusqu’en novembre ou décembre sans difficulté ; mais on évitera les variétés tardives dans ces situations qui semblent perdre du potentiel un peu plus rapidement.


Figure 3 : Synthèse issue d’essais Nord-Picardie (1991 à 2016) – dominante de limons 

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En bonnes conditions d’implantation, la densité de semis peut être raisonnée

En préalable et suite aux conditions particulières de l’année 2016, des tests de germination avec des lots triés (élimination des petits grains fusariés) ont été réalisés. Ces tests montrent que malgré des PMG faibles, la faculté germinative n’est pas affectée. Puisque l’on calcule les densités en gr/m², il pourra même y avoir une petite économie de semences…

D’après la figure 4, les conseils « plutôt sécuritaires » en grains/m² semés prennent en compte la date de semis, le type de sol et les conditions du semis.

Rappelons qu’une trop forte densité engendre des dépenses supplémentaires en semences mais également en protection contre la verse et les maladies.


Figure 4 : Densités de semis en fonction du sol, de la date et des conditions de semis

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L’optimum pour un sol limoneux se situe entre 150 et 300 gr/m² mais selon le graphique présenté ci-dessous (effet de la densité de semis sur le rendement en fonction du rendement maximal de l’essai), on observe que quel que soit le type de sol, ces conseils (tableau ci-dessus) peuvent encore être ajustés puisqu’en descendant à 150 gr/m² semés, on peut atteindre 97 % du potentiel maximal en limons et 96 % en sable ou cranette.

Cette synthèse a également permis de montrer que les peuplements visés en sortie hiver sont identiques quelle que soit la variété. Une variété à faible tallage n’a pas besoin d’être semée plus drue.
Figure 5 : Synthèse issue d’essais Nord-Picardie (1991 – 2016) 
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En parallèle de ces premières économies d’intrants, ces premiers choix auront aussi des répercussions sur le désherbage, la gestion des ravageurs et des maladies.

Retarder la date de semis permet de réduire la pression parasitaire (adventices et ravageurs)

Le décalage de la date de semis est également un levier agronomique efficace sur le désherbage. Le fait de semer plus tard permet de différer la levée de la culture après les premières levées d’adventices problématiques. Cette technique présente un intérêt sur les adventices germant couramment aux périodes d’implantation des cultures. C’est le cas du vulpin, du ray-grass ou encore du brome pour les céréales d’hiver.

En 2016, deux essais (un essai ray-grass et un essai vulpins) croisant des pratiques de décalage de dates de semis avec des stratégies chimiques ont été mis en place. L’objectif de ces expérimentations était de quantifier l’effet cumulé du décalage de la date de semis du blé et d’une pratique chimique sur une graminée problématique. Sur l’essai « vulpins » de Saint-Ambroix (18), le fait de décaler (en situations très infestées) la date de semis de 10 jours a déjà permis de réduire la levée de vulpins (comptés au stade 3 feuilles du vulpin) de 37 %. Un décalage d’un mois permet de réduire de 94 % la levée de vulpins. Ces chiffres confirment des références plus anciennes.
Figure 6 : Essai de Saint-Ambroix (18) – automne 2015

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Pour chaque modalité chimique appliquée dans cet essai, les efficacités notées sont à l’avantage de la date de semis tardive, suivie de celle intermédiaire pour finir sur la date de semis dite précoce. Les solutions comprenant une sortie d’hiver ont des écarts d’efficacité réduits (maximum 3 points). Cependant, l’avantage reste toujours à la date de semis tardive pour l’ensemble des modalités. Le semis tardif permet un investissement plus faible pour un désherbage satisfaisant. De plus, il est le seul qui permet d’atteindre un niveau de propreté total. Ce qui n’est pas négligeable surtout dans les situations les plus infestées.

On pourra aussi profiter de ce temps disponible pour réaliser un faux-semis supplémentaire sur les parcelles très infestées. Les faux-semis favorisent les germinations d’adventices et permettent de les détruire avant la mise en place de la culture. Dans certains systèmes, en particulier sans labour, il s’agit même d’une opération primordiale pour gérer les adventices. La réussite d’une opération de faux-semis, dépendra de la qualité de celui-ci, en particulier la profondeur de travail et de l’émiettement de la terre mais aussi de divers critères intrinsèques liés à l’adventice elle-même telles que la dormance, la profondeur de germination et bien entendu l’époque de germination. Le climat aura aussi son importance ; notamment la pluviométrie qui interviendra après la réalisation du faux-semis. Il est toutefois admis que l’opération de faux-semis, réalisée durant l’été (fin août et septembre) a une action sur les graminées automnales de type ray-grass, bromes et vulpin.

Le décalage de la date de semis permettra aussi de diminuer le risque ravageurs notamment le risque pucerons, on pourra alors aussi se poser la question de l’économie d’un traitement de semences à base d’imidaclopride pour les semis tardifs ; à condition tout de même de rester vigilant, d’observer ses parcelles et de pouvoir intervenir avec un traitement en végétation si une attaque tardive de pucerons (comme l’hiver dernier) se produisait.

Anne-Sophie COLART, Thierry DENIS, Elodie GAGLIARDI (ARVALIS – Institut du végétal)

 

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