Désherbage du maïs : quelles stratégies pour 2019 ? (Centre Bassin Parisien)

La pluie et l’humidité du sol de ces derniers jours ont été favorables, dans la majorité des secteurs du Centre Bassin Parisien aux applications d’herbicides sur les maïs.

Pour rappel, les herbicides racinaires nécessitent un cumul de 10mm de pluie dans les 15 jours qui suivent l’application pour garantir une efficacité optimale.

Un début de campagne dans le sec

Les chantiers de semis sont presque terminés en maïs grain et la plupart sont levés. Quant aux maïs fourrages, ils sont moins avancés même si les semis ont débuté.

Le mois d’avril a été marqué par des cumuls de températures au-dessus des médianes et une pluviométrie très basse. Pour les semis précoces réalisés de fin mars à début avril, les applications de prélevée ont dans la plupart es cas été reportées. Les conditions météo ont été plus favorables durant la seconde quinzaine du mois d’avril.

Carte 1 : Cumul de précipitations du 1er au 14 avril 2019

Carte 2 : Cumul de précipitations du 15 au 24 avril 2019

Figure 1 : Cumuls de degrés-jours (en °C seuils 6-30)

Figure 2 : Cumuls de pluie

Les herbicides racinaires, indispensables pour la gestion préventive des graminées

Pour un désherbage réussi, il est important de bien repérer le stade du maïs afin de limiter au maximum un risque de sélectivité sur de jeunes plantes. On évitera toutes applications sur des maïs trop précoces et le cas échéant, on attendra le stade 2 feuilles en s’assurant du bon état végétatif.

Dans tous les cas, on cherchera à inventorier de manière précise la flore déjà présente, ou attendue, sur la parcelle (espèces et stades de développement) afin de choisir les produits et composer les mélanges les plus adaptés. La présence assurée de graminées – telles panics, sétaires, digitaires ou encore ray-grass – impose quasiment l’application d’un produit racinaire en prélevée ou en postlevée précoce. La dose d’application est gérée selon la nature de la flore, le degré d’infestation attendu et les types de sol. La gestion préventive des graminées limite la probabilité d’avoir recours en postlevée à des associations sulfonylurées + auxiniques sur des flores avec vivaces, associations délicates à manipuler en termes de sélectivité.

Gestion de flore classique en un passage : la prélevée renforcée ou la postprécoce

Sur ces flores les plus simples, l’objectif est de maîtriser les dicotylédones et de prévenir l’éventuel développement de graminées. Plusieurs approches sont possibles selon le degré d’infestation, la nature des sols et les objectifs du producteur en nombre de passages.

MISER SUR UNE PRÉLEVÉE SEULE RENFORCÉE

L’utilisation d’un herbicide à large spectre en prélevée du maïs dans l’optique de ne réaliser qu’un seul passage est une solution possible. Dans ce cas, nous proposons l’utilisation de l’isoxaflutole (IFT) composant du Merlin Flexx, associé à un chloroacétamide. A la place de l’IFT, il est possible d’utiliser la pendiméthaline qui possède également un spectre large (Prowl 400 ou Atic-aqua). Pour une bonne efficacité, la pendiméthaline nécessite une humidité du sol suffisante et persistante. Attention toutefois à ne pas l’utiliser en sol filtrant ou en cas de semis mal recouvert car la pendiméthaline est phytotoxique pour le maïs si elle vient au contact des racines (racines en « massue »). L’emploi de Camix seul ou renforcé par de l’IFT ou de la pendiméthaline peut constituer également une bonne stratégie. L’Adengo Xtra (IFT et thiencarbazone) utilisé seul ou de préférence en association avec un chloroacétamide (Dual Gold ou Isard) peut également être une alternative.

Cette stratégie présente l’avantage de ne réaliser qu’un seul passage. Elle peut néanmoins être mise en défaut lorsque les conditions d’activité des produits sont perturbées par la sécheresse en prélevée ou par la levée tardive de certaines dicotylédones. Il est alors nécessaire de rattraper en postlevée, le plus souvent avec une tricétone contre les dicotylédones classiques.

Tableau 1 : Doses des antigraminées de prélevée selon le type de sol

La dose du produit commercial de prélevée doit être élevée pour être efficace mais modulée en fonction du type de sol. Entrent en ligne de compte : la teneur en matière organique (qui « bloque » la matière active) et/ou le type de sol (sableux ou filtrant, limon battant qui augmente le risque de manque de sélectivité de certaines matières actives). Les doses ci-dessus sont indicatives et peuvent être modulées selon la connaissance de la parcelle, l’historique de l’usage de ces produits, et les degrés d’infestation. Il est important de noter que les firmes détentrices de produit à base de s-métolachlore recommandent de ne pas dépasser une dose de 1000 grammes de substance active par hectare, sur maïs grain et fourrage.

PASSER UNIQUEMENT EN POSTLEVÉE PRÉCOCE

Passer uniquement en postlevée peut constituer une alternative dans différents cas :
– si les conditions en postsemis – prélevée sont très mauvaises,
– si les semis sont très précoces,
– si l’on est sûr de l’absence de certaines graminées…

Le report en postlevée précoce (1-3 feuilles du maïs, adventices en cours d’émergence) d’associations à base de Dual Gold ou Isard avec une tricétone (Camix) et/ou une sulfonylurée constitue une option possible. La thiencarbazone-méthyl (Adengo Xtra) peut également être utilisée en association avec un chloroacétamide ou une sulfonylurée (nicosulfuron) en post-précoce pour ce type de flore.

Ce type de stratégie, testé depuis des années dans les réseaux d’essais, présente l’avantage d’être moins sensible aux conditions climatiques que la prélevée seule. L’efficacité foliaire des produits vient ici contrebalancer un manque d’efficacité des produits racinaires en conditions sèches.

Tableau 2 : Exemples de stratégies sur flore simple de dicotylédones classiques en prélevée ou postlevée précoce
N.B. : Il est important de noter que, dès cette campagne, les conditions d’utilisation du S-métolachlore recommandées par la société Syngenta évoluent, en vue de pérenniser la présence de cette molécule dans la gamme des herbicides maïs et sorgho. Ces recommandations sont également relayées par Phyteurop, Protex et Sapec Agro concernant leurs spécialités. Dans ce contexte, les firmes recommandent de limiter la dose maximale de s-métolachlore sur maïs grain et fourrage à 1000 grammes de substance active par hectare.

Que faire en présence de flore complexe ou difficiles ?

La présence assurée de graminées, qu’il s’agisse de PSD ou de ray-grass ou certaines dicotylédones comme les véroniques de Perse, impose de fait l’application d’un produit de prélevée. Outre l’efficacité sur les premières levées, c’est essentiellement la rémanence des produits de la famille des chloroacétamides qui confère au programme sa robustesse. La dose d’application doit être soutenue et gérée selon les types de sol.

Concernant le cas spécifique des ray-grass résistants, notamment aux sulfonylurées, le recours à une double application de chloroacétamide en prélevée s’avère souvent plus performant. Les résultats acquis récemment mettent en évidence une meilleure efficacité des associations à base de S-métolachlore et de DMTAP (Isard 1,2 + Dual Gold 1,6 ou Dakota P 3 + Dual Gold 1,6).

Tableau 3 : Programmes spécifiques à la gestion du ray grass dans le Bassin Parisien

Les conditions d’application jouent sur la sélectivité des herbicides foliaires systémiquesIl est primordial de veiller à être dans de bonnes conditions d’application des herbicides foliaires systémiques. Les conditions avant et après le traitement influent sur le risque de phytotoxicité et sur l’efficacité des produits (tableau 4).

Tableau 4 : Impacts des conditions d’application sur la sélectivité des herbicides foliaires systémiques

Manon BOISSIERES (ARVALIS – Institut du végétal)
Damien LECLERCQ (ARVALIS – Institut du végétal)